Alain Grandjean
Face au changement climatique, tout le monde doit prendre sa part
Economiste, associé fondateur de Carbone 4, Président de la Fondation Nicolas Hulot, et membre du Haut Conseil pour le climat, Alain Grandjean s’adresse aux professionnels de la logistique.

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Alain Grandjean

Economiste, associé fondateur de Carbone 4, Président de la Fondation Nicolas Hulot, et membre du Haut Conseil pour le climat, Alain Grandjean s’adresse aux professionnels de la logistique.


Le changement climatique est avéré. La hausse des températures se poursuit avec comme cause principale, les gaz à effet de serre (GES). On sait aussi que l’on n’est pas du tout sur la bonne trajectoire, car les GES continuent à croitre et des pays, y compris la France, qui ont pourtant pris des engagements, notamment avec l’Accord de Paris, ne les respectent pas. La dérive climatique est engagée et elle est irréversible. Notre seule marge de manoeuvre est d’en limiter l’amplitude.

Selon le scénario adopté, les conséquences sont très contrastées d’ici à 2100. Si on continue comme aujourd’hui, on observera des résultats ultra-dramatiques : dans certaines régions, le croisement des courbes de chaleur et d’humidité, rendra la vie humaine impossible. Autre projection, dans le cas où l’on parvient à faire baisser les températures de 2°c, il y aura quand même des conséquences, que l’on peut déjà observer aujourd’hui, avec, par exemple, des inondations, des glissements de terrain, des sécheresses..., qui ont permis une réelle prise de conscience depuis 2 ou 3 ans, alors même que les scientifiques sont en alerte depuis longtemps. Et ce dérèglement climatique aggrave l’érosion de la biodiversité, déjà préoccupante.

Face à tout cela, ce n’est pas moi, individu, ou moi, entreprise, qui vais sauver la planète et ce n’est pas l’Etat non plus. Pour atteindre le « zéro émissions nettes » d’ici 2050, tout le monde doit prendre sa part, car c’est techniquement et technologiquement possible. Les pouvoirs publics doivent, entre autres, produire un cadre réglementaire cohérent, par exemple en faisant le lien entre la LOM et la stratégie nationale ; les citoyens-consommateurs doivent adopter des modes de vie durables et avoir une consommation responsable.

Et vous, acteurs de la logistique, que pouvez- vous faire ? L’implantation des bâtiments logistiques constitue une responsabilité directe. Pour limiter l’artificialisation et atteindre à terme l’objectif d’un « zéro artificialisation nette », vous pouvez vous concentrer sur la réhabilitation de friches et autres terrains déjà artificialisés, verticaliser les bâtiments, penser au « réusage » après conception, penser à la nature immédiatement environnante... Mais il y a ces injonctions contradictoires avec les PLU, ICPE, étude 4 saisons, etc. à résoudre. Par ailleurs, le fret, sujet central en France, va beaucoup évoluer dans les années qui viennent. L’entrepôt étant un lieu de passage, ils peuvent devenir un lieu de rechargement pour les véhicules, qui auront adopté des énergies alternatives.

«Si on continue comme aujourd’hui, on observera des résultats ultra-dramatiques : dans certaines régions, le croisement des courbes de chaleur et d’humidité, rendra la vie humaine impossible.»

Alain Grandjean,

Enfin, réflexion prospective : êtes-vous sûrs et certains que la consommation matérielle va toujours croitre ? Que le consommateur va toujours vouloir tout et tout de suite ? Je n’en suis pas si sûr... Et sans parler de décroissance, la question des évolutions futures des modes de consommation mérite d’être posée... »